Quarante-sept organisations de la société civile, dont Inter Pares, ont émis une déclaration commune au sujet du processus de paix en Colombie:
Des organisations canadiennes demandent un engagement non équivoque en faveur de la paix et du respect des droits de la personne en Colombie
Ottawa, le 20 septembre 2019
En cette veille de la Journée internationale de la paix, les organisations canadiennes signataires de la présente unissent leur voix afin d’exprimer leur vive préoccupation devant l’aggravation de la crise des droits de la personne qui sévit en Colombie et la menace constante qui pèse sur le processus de paix dans ce pays.
En 2016, un accord de paix historique a été conclu entre le gouvernement colombien et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), dans le grand espoir de mettre fin à 52 années de conflit armé. Il y a moins d’un mois, le processus de paix a toutefois été sérieusement compromis lorsque nombre d’anciens commandants des FARC démobilisées ont annoncé qu’ils reprenaient les armes. Ils ont évoqué le non-respect de l’accord de paix par l’État colombien, de même que l’assassinat systématique de leaders sociaux et de membres démobilisés des FARC.
De l’avis général, le président Duque et son parti politique ont systématiquement miné l’accord de paix. Ils ont insuffisamment financé plusieurs composantes essentielles de cet accord, ont ouvertement attaqué le système judiciaire de transition, et ont tardé à réintégrer les ex-combattant-e-s à la vie civile. Fait troublant, ils ont promu et promulgué des lois diamétralement opposées à l’entente de paix, notamment en ce qui a trait aux dispositions liées à la réforme agraire et au développement rural — deux éléments problématiques qui ont engendré le conflit armé et dont la résolution demeure essentielle au maintien de la paix. Poussé par l’administration états-unienne, le gouvernement Duque a également rejeté les ententes se rapportant à la substitution de cultures illicites. Toutes ces mesures ont eu un impact négatif disproportionné sur les femmes en milieu rural de même que les populations autochtones et afro-colombiennes.
Nous sommes profondément préoccupé-e-s par le peu, voire l’absence de mesures entreprises pour contraindre les brigades de la mort paramilitaires qui continuent de menacer et de tuer les leaders communautaires en toute impunité. Depuis la signature de l’accord de paix en décembre 2016, au moins 700 leaders de mouvements sociaux et 142 insurgé-e-s démobilisés ont été assassinés. Depuis cette même date, 260 000 autres Colombien-ne-s ont été déplacés de force, ce qui porte le nombre total de personnes déplacées intérieures (PDI) à environ 7,8 millions — il s’agit du plus important nombre de PDI au monde. En juin de cette année, Agnès Callamard, la rapporteuse spéciale des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a exhorté le gouvernement colombien à cesser d’« inciter à la violence » contre les membres démobilisés des FARC.
À titre d’organisations canadiennes, nous réitérons notre solidarité envers le peuple colombien, de même que notre appui à leur désir de bâtir un pays où la paix et la justice prévalent, et où les inégalités politiques, économiques et sociales profondément enracinées sont combattues. Nous partageons la conviction des Colombien-ne-s que l’accord de paix constitue une importante étape dans ce processus, et qu’il doit être défendu avec vigueur.
Nous demandons au gouvernement canadien de mettre à profit l’étroite relation qu’il entretient avec la Colombie pour :
Nous exhortons le gouvernement canadien à accroître son soutien politique et économique aux initiatives de paix en Colombie, et à faire en sorte que les intérêts canadiens en matière de commerce et d’investissement présents en Colombie ne nuisent d’aucune façon au processus de paix.
1INDEPAZ, Informe Especial: Violaciones a los Derechos Humanos en tiempos de Paz, p. 13.
2Gobierno de Colombia, Unidad para la atención y reparación integral a las víctimas, Cifras: Desplazamiento - Personas.
3UNHCR, Global Trends: Forced Displacement in 2018, p. 6.
4OHCHR, Colombia: UN experts condemn attacks on reintegrated former combatants, urge respect for peace process.