Verdict historique de l’IACHR dans un procès sur le droit à l’avortement au Salvador

La Cour interaméricaine des droits de l’Homme (IACHR) a livré un verdict historique le 20 décembre 2024, déclarant l’État du Salvador coupable de violence obstétrique à l’endroit de Beatriz pour lui avoir refusé l’accès à un avortement en 2013. Le verdict établit aussi que le Salvador a violé le droit de Beatriz au respect de la vie privée, à la protection judiciaire, à la santé et à une vie exempte de violence.   

Des organisations féministes de la région – dont La Colectiva Feminista para el Desarollo Local, homologue de longue date d’Inter Pares – et d’ailleurs dans le monde ont salué le verdict, qui marque un progrès considérable dans la quête de justice pour Beatriz et d’autres femmes ayant vécu de la violence au Salvador et ailleurs. Avec d’autres organisations, La Colectiva accompagne la cause de Beatriz dans le système interaméricain depuis 2013. C’est une victoire durement acquise dans un contexte incroyablement hostile à l’autonomie corporelle ainsi qu’à la santé et aux droits sexuels et reproductifs. Au Salvador, l'avortement est illégal en toutes circonstances, y compris en cas de viol ou de grossesse mettant la vie en danger.

Beatriz était une femme en situation de pauvreté au Salvador quand l’État lui a refusé un avortement en 2013, malgré l’avis des médecins qui estimaient le fœtus non viable et la grossesse potentiellement mortelle. Après 26 semaines de grossesse, des médecins ont fini par faire une césarienne à Beatriz. Le bébé est mort dans les heures qui ont suivi. Si Beatriz a survécu à la procédure, le refus d’avorter lui a fait subir pendant des mois une grossesse dangereuse pour sa vie et des complications subséquentes. Beatriz est malheureusement décédée prématurément en 2017. Même si l’IACHR n’a pu établir de lien direct, des circonstances ayant mené à sa mort ont été liées aux complications subies en raison de la grossesse. 

En plus d’accompagner la cause devant l’IACHR, La Colectiva a fait campagne pour sensibiliser à la façon dont les lois antiavortement du Salvador mettent la vie des femmes en danger et limitent leur avenir, surtout dans le cas des femmes pauvres. Ainsi, La Colectiva a collaboré avec d’autres organisations à la couverture en direct de l’audition de la cause de l’IACHR au Salvador, offrant un espace de réflexion et d’analyse à près de 1000 personnes d’un bout à l’autre du pays. La Colectiva a aussi mobilisé les jeunes dans le cadre d’ateliers de théâtre visant à réécrire l’histoire de Salvadoriennes – des jeunes ont pu se reconnaître dans l’histoire de Beatriz. « La lutte de Beatriz et sa famille a mis en lumière la violence vécue par les femmes au Salvador et ailleurs dans le monde », ont déclaré les co-plaignant-e-s, dont La Colectiva, dans un communiqué de presse émis après le verdict de la Cour. « Cette décision nous rapproche de ce que Beatriz a toujours voulu : qu’aucune autre femme ne vive ce qu’elle a vécu. »

Dans les mois à venir, La Colectiva supervisera l’application par le Salvador des mesures de réparation ordonnées par l’IACHR, notamment de nouvelles lignes directrices pour le personnel médical et juridique qui traite des cas de grossesse à risque élevé pour la santé ou la vie d’une femme, reflétant les normes les plus élevées pour la protection de la santé, la vie et l’intégrité des femmes.

Inter Pares applaudit et célèbre le verdict avec son homologue. Nous soutenons La Colectiva dans sa lutte pour la décriminalisation de l'avortement et l'accès à celui-ci depuis 2006. En 2019, Inter Pares a aidé La Colectiva à intensifier son travail de plusieurs décennies, grâce au projet Interventions stratégiques pour stimuler la santé et les droits sexuels et reproductifs, subventionné par Affaires mondiales Canada. Alors que La Colectiva poursuit sa lutte pour les droits reproductifs et la justice au Salvador, nous restons à ses côtés.