Le Sénégal ouvre la voie à une transition vers l'agroécologie

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En 2019, le président du Sénégal nouvellement réélu, Macky Sall, a annoncé que l'agroécologie serait un axe prioritaire de son Plan Sénégal Émergent -Vert. Pour profiter pleinement de cette ouverture politique, notre homologue ENDA Pronat a co-initié la Dynamique pour une transition agroécologique au Sénégal (DyTAES), un réseau d’organisations paysannes, de femmes rurales, d'organisations communautaires, de maires, de chercheurs et du secteur privé. Pendant trois mois, le réseau a organisé des ateliers dans 32 localités du Sénégal afin de recueillir des recommandations politiques pour éclairer la mise en œuvre du plan quinquennal du gouvernement. Du 30 janvier au 1er février 2020, plus de 400 participants nationaux et internationaux se sont réunis à Dakar aux Journées de l’agroécologie pour discuter et valider les principales recommandations politiques. Lors de l'événement, des représentants de l'Union européenne, de la FAO et de la CEDEAO ont annoncé plusieurs initiatives de plusieurs millions de dollars pour développer l'agroécologie dans le pays. Lors de la clôture de l'événement, le ministre de l'Environnement, Abdou Karim Sall, a accepté le document de recommandations au nom du président du Sénégal, devant une foule de 1 500 personnes.

Qu'est-ce que l'agroécologie?

L'agroécologie est souvent décrite comme une science, une pratique et un mouvement social. Contrairement à l'agriculture conventionnelle qui dépend fortement des intrants externes et des systèmes de monoculture, l'agroécologie se concentre sur la biodiversité, nourrit la santé des sols et stimule les interactions entre les différentes espèces pour augmenter la matière organique et contrôler les ravageurs et les mauvaises herbes.

Pourquoi est-elle nécessaire?

La population du Sénégal devrait passer de 16 millions à plus de 25 millions de personnes d'ici 2035. Des décennies d'agriculture non durable basées sur le modèle de la révolution verte (monoculture et dépendance à l'égard de semences hybrides combinées à des intrants chimiques) ont laissé des sols jadis fertiles, fortement dégradés. Un sol endommagé abaisse sa fertilité et les rendements des cultures et l’empêche à retenir l'eau et l'humidité. Avec les changements climatiques, des sécheresses et des averses plus graves risquent d'augmenter l'érosion des sols et la désertification. Dans le monde entier, un consensus scientifique émerge (IPBES, 2019, IPCC, 2019, Lancet-EAT) de la nécessité d’abandonner l’agriculture hautement dépendante d’intrants chimiques et de miser plutôt sur l'agroécologie pour à la fois améliorer la résilience des cultures et atténuer les changements climatiques.

Recommandations de la DyTAES pour une transition agroécologique au Sénégal

La DyTAES appelle le gouvernement sénégalais à adopter une approche intersectorielle et holistique pour relever les multiples défis de l'alimentation d'une population croissante tout en protégeant les ressources naturelles menacées du pays.

Quatre domaines prioritaires sont identifiés:

  • améliorer et sécuriser l'accès aux ressources productives (terre, diversité des semences, eau);
  • augmentation durable de la productivité de la production agro-sylvo-pastorale et de la pêche, grâce à l'accès des exploitations familiales aux intrants biologiques et à la priorisation de l'agroécologie dans la recherche et le travail de vulgarisation rurale
  • promotion des produits agroécologiques sur les marchés locaux
  • améliorer l'environnement de gouvernance et de financement pour aider les exploitations familiales à adopter l'agroécologie et changer les habitudes de consommation pour opter pour les aliments agroécologiques.

Une vue du terrain

Oumar Ba est le maire de la commune de Ndiob, qui regroupe 22 villages et une population d'environ 22 000 habitants. Selon M. Ba, il est maintenant temps de développer l'agroécologie. «Il y avait de nombreux petits exemples d'agroécologie. Mais nous avions envie de tester au niveau communal. Si nous pouvons nourrir les habitants de la commune, nous pouvons étendre cette approche à l'ensemble du pays. » Au cœur de sa vision de ses communautés se trouve la notion d'autonomie. «Nos marchés sont submergés de produits étrangers. Nous voulons manger ce que nous produisons. Nous faisons la promotion de l'alimentation locale. Nous avons une unité de transformation pour les céréales, l'huile d'arachide et les produits forestiers. Nous avons réuni nos aînés et nos guérisseurs pour comprendre quels arbres étaient utilisés en médecine traditionnelle et nous allons reboiser 10 000 arbres ». La vision est que chaque maison de la commune ait au moins un arbre d'ombrage, un moringa (arbre médicinal) et un arbre fruitier.

À Ndiob, ils ont également appliqué la technique du zaï  à la culture du mil. Cette technique est pratiquée pendant la saison sèche et consiste à creuser des cuvettes dans le sol et à appliquer une petite quantité de compost et de fumier. Les petites fosses captent les eaux de ruissellement pendant la saison des pluies, tandis que le compost et le fumier attirent les termites qui ameublissent davantage le sol et augmente sa fertilité. Cette innovation a entraîné d'importantes augmentations de rendement, passant de 400 kilos à 900 kilos l'hectare.

Rôle d'Inter Pares

Inter Pares était la seule organisation canadienne à l'événement. Notre contribution financière a facilité la participation de 16 femmes leaders rurales de tout le Sénégal. En tant qu'organisation féministe, nous comprenons les dynamiques de pouvoir inégales qui rendent les femmes plus vulnérables aux changements climatiques. Nous comprenons également le rôle clé des femmes dans la pratique et la promotion de l’agroécologie. Il était tout à fait approprié que Mariam Sow, directrice de l’ENDA Pronat et affectueusement surnommée «maman agroécologie», présente au ministre de l’Environnement les recommandations de la politique à la clôture des Journées de l’agroécologie. Cet honneur témoigne de la lutte menée depuis des décennies par ENDA Pronat, en collaboration avec des femmes rurales courageuses de partout au pays pour promouvoir un modèle agricole qui protège les ressources naturelles et la biodiversité du pays.

Our impact

ENDA Pronat et ses alliés lancent une série de recommandations politiques pour soutenir la transition du Sénégal vers l'agroécologie

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