Salmmah : Des jeunes Soudanaises brisent les tabous

Nouvelles : Analyses

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Fahima Hashim
Fahima Hashim: directrice de Salmmah. Crédit: Rita Morbia

Après avoir fait partie des femmes les plus émancipées de la région, les Soudanaises sont soumises depuis quelque trois décennies  à la charia, un droit fondé sur une interprétation conservatrice des principes de l’islam. Sous prétexte de religion, le régime militaire intégriste du Soudan sanctionne la violation des droits légaux et des libertés civiles des femmes. Nombre de ces contraintes sont liées au contrôle de la sexualité des femmes et des filles : code vestimentaire strict, impunité en cas de viol ou crime d’honneur, décriminalisation des mutilations génitales féminines, victimisation des survivantes d’agression sexuelle.

La répression politique qui suit le coup militaire de 1989, mené par l’actuel président Omar Al-Bashir, réduisit à la clandestinité les partis d’opposition, syndicats et mouvements sociaux, y compris le mouvement des femmes. Fahima Hashim, directrice du Salmmah Women’s Resource Centre et collaboratrice d’Inter Pares, explique que « les Soudanaises perdirent alors une grande partie des acquis des années 1960 et 1970. »

Depuis, les choses changent peu à peu. Les partis d’opposition se sont reformés et siègent au Parlement, le mouvement des femmes a refait surface et reprend de la vigueur. Sur les campus, les jeunes parlent de paix, de droits de la personne et de sexualité; les jeunes femmes s’indignent ouvertement de la politique de deux poids, deux mesures.

Par exemple, les universités rejettent les femmes qui ne portent pas le chaste uniforme islamique; on a embauché des gardes spéciaux pour mesurer la longueur des manches et des jupes, et jauger l’épaisseur des foulards. Pourtant, les administrateurs d’université ferment les yeux devant le harcèlement sexuel généralisé des femmes sur les campus.

Il y a quelques années déjà, dans le cadre de la coalition MOTIVE, Salmmah a lancé une campagne pour l’adoption de politiques contre le harcèlement sexuel sur les campus. La coalition tend la main aux étudiantes courageuses qui se sont mobilisées autour de ces enjeux. Vu le conservatisme politique et religieux, ce travail délicat exige du temps et une planification soigneuse; les militantes d’expérience savent trop comment l’État harcèle les personnes qui osent défendre publiquement les droits des femmes. Cette stratégie prudente permet aussi à Salmmah de créer un espace adapté aux moyens d’organisation des jeunes du Soudan – musique, Internet et médias sociaux plutôt que les classiques conférences et débats. En alliant l’expérience de militantes plus âgées à l’innovation et au leadership naissant des jeunes femmes, Salmmah veut promouvoir le respect des droits des femmes sur les campus, tout en aidant les jeunes femmes à prendre leur place au sein du mouvement des femmes soudanaises.

Au Soudan, les militantes d’expérience savent trop comment l’État harcèle les personnes qui osent défendre publiquement les droits des femmes.

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