Cultiver l’espoir : l’histoire d’Abdoulaye

Nouvelles : Analyses

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Abdoulaye avec sa mère Tiné Ndoye, sur sa ferme de légumes biologiques. Crédit: Eric Chaurette

Il y a huit ans, Abdoulaye Déme quittait son village des Niayes, au Sénégal, à bord d’une pirogue en route vers les Canaries. Bravant les forts courants et les vagues énormes du large, la petite barque a fini par toucher les côtes des îles espagnoles, 1500 kilomètres plus loin. À partir de là, Abdoulaye s’est rendu jusqu’au continent où il a passé des années loin de sa famille, dans la clandestinité et la pauvreté. L’histoire d’Abdoulaye n’est pas unique. La répétition des sécheresses et la dégradation des sols font des ravages et l’accès à la terre est limité. Alors bien des gens, surtout les jeunes, incapables de cultiver ou de trouver du travail, doivent partir pour la ville ou plus loin encore. Le dicton Barça ou Barzak, littéralement Barcelone ou la mort, est populaire au Sénégal. Il exprime le désespoir de bien des jeunes qui décident d’entreprendre le périlleux voyage vers le Nord en quête d’une vie meilleure.

En novembre 2018, Inter Pares a invité son homologue sénégalaise Mariam Sow, d’ENDA Pronat, au lancement à Ottawa du rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), La situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture, où elle s’est adressée à plusieurs représentants du gouvernement, du secteur humanitaire et du secteur du développement. Le rapport de l’ONU explore les connexions de la migration, de l’agriculture et du développement rural avec les changements climatiques, offrant un point de vue holistique des motifs qui poussent bien des gens comme Abdoulaye à choisir de migrer ou à y être forcés. Au dire du secrétaire général des Nations Unies, le défi consiste à « maximiser les avantages de la migration en veillant à ce que ce ne soit jamais un geste de désespoir. »

Mais l’histoire d’Abdoulaye ne s’arrête pas là. Comme Mariam l’a expliqué dans ses remarques, Abdoulaye est retourné au Sénégal après des années de misère en Europe et, grâce à la terre que sa mère a pu obtenir, il a mis sur pied sa ferme de légumes biologiques, s’est marié et est maintenant le fier papa de trois enfants. Cette fin heureuse d’une

histoire qui aurait pu virer à la tragédie n’est pas le fait du hasard. Abdoulaye est le fils de Tiné Ndoye, présidente du Réseau national des femmes rurales du Sénégal. De concert avec ENDA Pronat, elle a travaillé sans relâche à organiser des groupes de femmes, offrir de la formation en agroécologie et développer la demande de produits biologiques locaux dans les villes et villages avoisinants, notamment à Dakar. Ensemble, ils ont peu à peu renversé la situation et insufflé une vie nouvelle aux Niayes, une zone maintenant pittoresque où se multiplient les petites fermes maraîchères dans des vallées fertiles.

Mariam se plaît à le dire : il faut rendre l’agriculture agréable et permettre aux gens de vivre dans la dignité plutôt que de migrer par désespoir. Mariam a souvent répété ce message pendant son séjour au Canada, tant à l’assemblée générale du Réseau pour une alimentation durable, où elle a pris la parole, qu’à l’occasion de réunions avec des élus et des décideurs, dont la ministre du Développement international, Marie-Claude Bibeau. Grâce au travail d’ENDA Pronat et aux femmes courageuses du Réseau national des femmes rurales du Sénégal, pour bon nombre de jeunes, la promesse d’une vie meilleure est à leur portée.

Le dicton Barça ou Barzak, littéralement Barcelone ou la mort, est populaire au Sénégal. Il exprime le désespoir de bien des jeunes qui décident d’entreprendre le périlleux voyage vers le Nord en quête d’une vie meilleure.

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