La personne réfugiée : au-delà des étiquettes

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Des réfugiés karens de la Birmanie jouent un rôle important dans la gestion de leurs propres camps.
Des réfugiés karens de la Birmanie jouent un rôle important dans la gestion de leurs propres camps. Crédit: Kevin Malseed

Par Kevin Malseed

Imaginez-vous une personne migrante. Puis une personne réfugiée. Puis une personne déplacée. Vous en faites-vous la même idée pour les trois?

L’an dernier, les médias parlaient de personnes migrantes fuyant vers l’Europe. C’est seulement quand on a connu leur histoire qu’elles sont devenues des personnes réfugiées et que cela a complètement changé l’opinion publique à leur égard. Les étiquettes ont ce pouvoir partout dans le monde, comme en Birmanie, où chaque personne déplacée a son visage et son histoire, malgré des éléments communs.

Au nord-ouest de la Birmanie, plus d’un million de Rohingyas musulmans se sont fait accoler l’étiquette de résidents étrangers ou de Bengalis, quand une loi de 1982 a effacé toute trace de leur  histoire dans le pays. Depuis, une série d’attaques - commises parfois par l’armée birmane, parfois par des groupes de bouddhistes radicaux avec l’appui du gouvernement - en ont tué plusieurs et forcé la plupart à quitter leur foyer et leur terre. « Retournez chez vous! » C’est ce qu’on leur dit, même si la plupart des Rohingyas n’ont aucun lien avec le Bangladesh. Plusieurs ont payé des passeurs qui les emmènent par bateau dans le sud de la Thaïlande et les font entrer clandestinement en Malaisie. En route, nombre d’entre eux se font tuer ou rançonner par les trafiquants, ou sont remorqués en mer et abandonnés au large par les autorités thaïes. Il semble que personne ne veut de ces gens-là.

En Birmanie, des membres d’autres ethnies ont été déplacés à la suite de violations des droits de la personne commises par les militaires en toute impunité. La réaction de plusieurs collectivités a été de se déplacer sans cesse dans leur région pour échapper aux contrôles militaires. Sept jours après que l’armée eut brûlé sa maison, j’ai demandé à une femme depuis quand elle était déplacée. Je croyais qu’elle allait me dire « sept jours », mais elle m’a dit « dix-sept ans ». Des centaines de milliers de personnes sont encore déplacées à l’intérieur du territoire.

Plus de cent mille personnes ayant vécu sensiblement la même chose sont encore dans des camps de réfugiés en Thaïlande. Environ la moitié sont des personnes enregistrées, arrivées avant 2005. Les autres ne le sont pas, simplement parce que les autorités thaïes ont cessé d’enregistrer les réfugiés. Les personnes enregistrées ont le droit d’être réinstallées à l’étranger, notamment au Canada. Les autres, non. Quand on trouve une personne enregistrée qui travaille à l’extérieur du camp, on la renvoie au camp. Si elle n’est pas enregistrée, on la déporte.

Un million d’autres personnes ayant fui vers la Thaïlande vivent à l’extérieur des camps, comme migrants exerçant un emploi illégal dans des maisons privées et des ateliers clandestins. Pour 150 000 autres personnes qui vivent en Malaisie, dont une part croissante de Rohingyas, c’est la seule option, parce que la Malaisie refuse de signer la convention des Nations Unies sur les réfugiés ou de permettre les camps. Régulièrement arrêtés et détenus par les autorités, ils ne font pas la une des journaux et ne reçoivent pas souvent d’aide internationale.

Inter Pares utilise vos dons et les fonds versés par le gouvernement du Canada pour financer des soins de santé, fournir des moyens de subsistance, renforcer les capacités, défendre les droits de la personne et offrir des secours aux populations birmanes déplacées qui vivent ces situations. Par l’entremise d’homologues locaux, nous appuyons le travail des réfugiés qui dirigent leurs camps et celui d’organismes communautaires dirigés par des personnes déplacées qui en assurent les activités. Le gouvernement canadien vient d’approuver un nouveau financement sur cinq ans  pour des projets de ce genre – c’est un des rares pays qui continue à le faire. Plusieurs bailleurs de fonds ont cessé d’appuyer les personnes déplacées en Birmanie, croyant le problème réglé. Nous leur disons « Pas encore. »

Les étiquettes sont presque inévitables, mais elles exercent un impact démesuré sur la marginalisation, la solidarité et la coopération. À Inter Pares, nous croyons qu’il faut voir au-delà des étiquettes et démontrer notre soutien aux personnes qui sont en train de bâtir des sociétés plus justes et plus inclusives.

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