Les stérilisations forcées au Pérou : plus jamais

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Des femmes (y compris la directrice de DEMUS, Maria Ysabel Cedano, au centre) forment une chaine humaine devant le bureau du procureur de l'État péruvien responsable de traiter les cas de stérilisations forcées. Crédit: Iván Vicente

Mamérita Mestanza n’avait pas encore 34 ans quand elle mourut de complications liées à une ligature des trompes. Mère de sept enfants de milieu rural au Pérou, Mamérita avait reçu plusieurs fois la visite de responsables des services de santé qui lui ont dit que les femmes comme elle ayant eu plus de cinq enfants s’exposaient à une amende ou une peine de prison si elles n’acceptaient pas d’être stérilisées. Tout ça était faux. Personne n’expliqua à Mamérita les conséquences de l’opération ou ses risques. Elle ne reçut pas non plus les soins médicaux réclamés à maintes reprises par sa famille après l’opération, quand Mamérita développa une grave infection.

L’histoire de Mamérita Mestanza est loin d’être unique. Entre 1995 et 2000, sous prétexte de combattre la pauvreté en milieu rural, le gouvernement d’Alberto Fujimori aurait stérilisé quelque 300 000 femmes et 20 000 hommes. Il s’agissait souvent de femmes et d’hommes autochtones pauvres et illettrés, dupés ou forcés d’accepter l’opération sous la menace de perdre leurs médicaments ou leur allocation de nourriture. On imposait des quotas aux responsables de la santé publique et pour atteindre leur cible, il leur arrivait souvent de stériliser des femmes à leur insu ou sans leur consentement lors de visites de routine pendant la grossesse ou à la suite d’un accouchement.

L’homologue d’Inter Pares DEMUS fut à l’avant-garde de la lutte pour faire éclater la vérité au grand jour et obliger l’État péruvien à rendre des comptes. Avec d’autres organisations du Pérou, DEMUS présenta la cause de Mamérita devant la Cour interaméricaine des droits de l’homme en 1999. Le Pérou finit par admettre sa responsabilité et accepta de compenser la famille de Mamérita. Cette cause historique permit à un groupe initial de 2074 femmes de dévoiler leur histoire et réclamer justice. À la suite de pressions croissantes de la population, renforcées en partie par une campagne publique efficace de DEMUS, le gouvernement péruvien annonça en décembre 2015 la création d’un registre national des personnes touchées par les stérilisations forcées.

Tout au long de 2016, les partenaires d’Inter Pares au Pérou travaillent à faire connaître le registre auprès du public et aident les victimes à s’y inscrire. Le programme de stérilisation forcée du gouvernement Fujimori est l’un des chapitres les plus sombres de l’histoire du Pérou. Il faut tout mettre en œuvre pour assurer que de tels crimes ne se reproduisent plus jamais. 

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