La loi masculine, le patriarcat, prévaut dans tous les
domaines – dans la famille, au parlement, au champ et sur la place publique – au point que cette domination et son corollaire, la subordination des femmes, sont devenus l’ordre naturel des choses. C’est le modèle appliqué partout, même dans les sociétés modernes, libérales et libérées comme la nôtre.
Et pourtant, ce modèle est injuste. Il n’est pas sain –
d’abord évidemment pour les femmes, mais pas plus pour les hommes. Il n’est pas sain pour la planète. Et même si on essaie de nous faire croire le contraire, il n’est pas du tout naturel. C’est une aberration cruelle qui brime les possibilités humaines. Les crimes commis contre les femmes dans toutes les sociétés, la violence institutionnalisée qui s’exerce chaque jour contre elles, leur déshumanisation – tout cela est un crime impardonnable contre l’humanité. C’est le pivot des intégrismes de tout acabit, celui du
militarisme. Ce modèle force des milliards de femmes et d’enfants dans le monde à vivre dans un état d’urgence permanente. Toute politique visant à transformer le monde et l’ordre social doit forcément inclure l’objectif formel de mettre fin à la violence fondée sur le sexe, de même qu’à la cruauté envers les femmes et les enfants, et celui de transformer le patriarcat en une véritable démocratie incluant toutes les personnes, indépendamment de leur sexe ou de leur sexualité.
Cela fait presque trente ans qu’à Inter Pares nous intégrons l’analyse en fonction du sexe et l’approche féministe à notre méthodologie et à nos programmes. Nous croyons aussi que les femmes ou la condition féminine ne constituent pas une question sectorielle ou une catégorie particulière. Nous considérons la lutte pour l’égalité comme une variable fondamentale indépendante qui imprègne l’ensemble de notre réflexion et de nos activités. Nous inspirant, entre autres, d’Andrea Dworkin et de bell hooks, nous avons défini l’égalité comme « une norme commune et universelle établissant la dignité et les possibilités reconnues à chaque personne sans distinction fondée sur le sexe, la race ou la classe sociale ». Dans ce document, nous étudions la façon dont le militantisme international pour la justice sociale peut
s’inspirer de ce principe et le transmettre.